l'Argent : l'objet principal du désir mimétique ?



L'argent n'est-elle pas l'objet par excellence du désir mimétique, décrit par René Girard dans Des choses cachées depuis la fondation du monde ?



Au delà du fait évident que chacun le désire, l'argent est, par définition et substance, complètement indifférentié. Il n'y a absolument aucun moyen de faire porter et diverger le désir de deux hommes sur deux objets différents. Au risque d'être trivial, quoi de plus semblable que deux billets de 100 euros, et il est absolument impossible que l'un préfère le premier et l'autre le deuxième, chacun désirant l'exact même chose.

En plus de cela, l'argent semble aussi l'agent indifférentiateur par excellence, l'annihilateur de la différence (cf. Bernanos et la France contre les robots ), puisque c'est l'unique dénominateur commun à toute chose, l'unique comparaison possible entre deux objets que tout sépare, et dont on ne peut rien comparer que le prix. Il permet enfin de transmuter tout en tout, puisque l'on peut vendre tel objet et racheter tel autre avec le produit de la vente.

L'argent de par son caractère indifférencié et surtout par sa capacité à annihiler la différence en réduisant chaque chose à sa valeur, est donc de nature à précipiter et à faciliter l'expression du désir mimétique.

Dans le cadre de la lecture de l'Evangile par René Girard, le Chist est venu pour sortir l'homme de la spirale du désir mimétique. Les avertissements si forts et si nombreux du Christ contre la tentation de l'argent me semblent donc faire partie intégrante de ce message, et de cette déconstruction du désir mimétique.

Enfin, il est possible que nous soyons actuellement dans les conditions de "l'apocalypse objective " que décrit René Girard (en s'appuyant dans son livre sur l'équilibre de la terreur de la guerre froide). Le désir pour l'argent est devenu si fort qu'il déchaine les passions dans le cadre du désir mimétique, et que nous sommes au bord de la destruction de notre monde par ce désir sans limite, mythologique même par les montants des sommes en jeu.

En sortirons nous à nouveau par un sacrifice du bouc émissaire (celui des "banquiers" ?) ou autrement? tel me semble l'enjeu critique de notre période.